Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Le juge administratif peut-il  apprécier l'opportunité de la  décision d’un maire de mettre fin aux fonctions d’un collaborateur de cabinet pour rupture du lien de confiance ?

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NON : dans un arrêt en date du 12 octobre 2022, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a jugé qu’il n'appartient pas au juge d'apprécier l'opportunité de la  décision d’un maire de mettre fin aux fonctions d’un collaborateur de cabinet mais seulement de vérifier qu'un tel licenciement ne repose pas sur un motif matériellement inexact, erroné en droit ou entaché de détournement de pouvoir. Il reste donc seulement possible que de  soulever les moyens d'inexactitude matérielle des faits, d'erreur de droit et de détournement de pouvoir.

Ainsi, et contrairement à ce que soutient à nouveau le requérant en appel, il ne résulte pas des dispositions de l'article 110 de la loi du 26 janvier 1984, ni d'aucune autre disposition ou même d'aucun principe général, qu'une décision de licenciement d'un collaborateur de cabinet, quand bien même il ne serait pas affecté sur un emploi fonctionnel au sens de l'article 53 de la même loi, ne pourrait légalement se fonder sur le seul motif d'une rupture du lien de confiance avec le maire. Dès lors, la décision du 14 juin 2017 n'est pas entachée d'une erreur de droit pour ce motif.

Il résulte de l'instruction que le maire a estimé que le lien de confiance qu'il entretenait avec M. A... a été rompu compte tenu du comportement de ce dernier, ce dont témoignent tout d'abord les éléments précis relatés par le directeur de cabinet dans ses notes rédigées à l'attention de la direction des ressources humaines les 4 juillet et 24 octobre 2016 et le 17 février 2017, ainsi que les faits décrits dans les courriels échangés entre M. A... et le directeur de cabinet.

Ces documents montrent que la relation de confiance entre le requérant et le maire s'est progressivement dégradée à compter du deuxième trimestre de l'année 2016 sous l'effet des nombreuses absences de l'intéressé pour maladie entre juin et octobre 2016, puis quasiment durant tout le premier semestre 2017, comme le reconnaît lui-même M. A..., mais aussi des difficultés rencontrées par celui-ci pour tenir son poste de travail en raison d'autres absences injustifiées, de problèmes personnels qui ont eu un retentissement sur le travail collectif et encore de son refus de s'acquitter de certaines tâches.

A cela s'ajoutent les comportements dont a fait preuve dans sa vie personnelle M. A... qui a été pénalement condamné en octobre 2016 pour des faits de harcèlement à l'encontre de sa compagne et a provoqué un accident de circulation en mars 2017 alors qu'il conduisait en état d'ébriété, la matérialité de ce fait n'étant pas contestée.

Ces différents évènements, qui ont porté préjudice au bon fonctionnement du cabinet du maire et à l'image de la collectivité, doivent être regardés comme suffisamment établis au dossier, quand bien même il conviendrait de ne pas prendre en compte un quatrième rapport du directeur de cabinet daté du 13 juin 2017, soit postérieurement à l'entretien préalable au licenciement qui s'est déroulé le 6 juin 2017.

Le maire de Brive-La-Gaillarde entretient nécessairement une relation particulière, empreinte de confiance personnelle, avec ses collaborateurs de cabinet, et dispose, en vertu de l'article 110 précité de la loi du 26 janvier 1984, d'une grande liberté pour les recruter comme pour mettre un terme à leurs fonctions. Ainsi, et alors que M. A... n'a pas modifié son comportement malgré plusieurs rappels à l'ordre, le maire était fondé à prononcer le licenciement de ce collaborateur pour perte de confiance, sans qu'y fasse obstacle la seule circonstance que l'intéressé aurait été en congé de maladie du mois de mars au mois de juin 2017.

SOURCE : CAA de BORDEAUX, 2ème chambre bis (formation à 3), 12/10/2022, 20BX02318, Inédit au recueil Lebon

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