NON : dans un arrêt en date du 10 juin 2021, le Conseil d’Etat a considéré que la seule circonstance qu'un réfugié, condamné pour des faits qui, lorsqu'ils ont été commis, établissaient que sa présence constituait une menace grave pour la société, se soit abstenu, postérieurement à sa libération, de tout comportement répréhensible, n'implique pas, par elle-même, du moins avant l'expiration d'un certain délai, et en l'absence de tout autre élément positif significatif en ce sens, que cette menace ait disparue.
Les infractions pénales commises par un réfugié ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une décision mettant fin au statut de réfugié.
Il appartient à l'Office français de protection des réfugiés (OFPRA) et, en cas de recours, à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), d'examiner la gravité de la menace que constitue la présence de l'intéressé en France en tenant compte, parmi d'autres éléments, de la nature des infractions commises, des atteintes aux intérêts fondamentaux de la société auxquels la réitération de ces infractions exposerait celle-ci et du risque d'une telle réitération.
La seule circonstance qu'un réfugié, condamné pour des faits qui, lorsqu'ils ont été commis, établissaient que sa présence constituait une menace grave pour la société, se soit abstenu, postérieurement à sa libération, de tout comportement répréhensible, n'implique pas, par elle-même, du moins avant l'expiration d'un certain délai, et en l'absence de tout autre élément positif significatif en ce sens, que cette menace ait disparue.
L’intéressé ayant été condamné pour son implication dans l'organisation d'un réseau d'immigration clandestine à destination de divers pays européens dont il était un des principaux instigateurs, et étant, au demeurant, à la date de la décision attaquée, toujours sous le coup d'une interdiction judiciaire du territoire français d'une durée de dix ans.
S'il a affirmé avoir cessé tout lien avec les membres de son réseau et n'a pas attiré l'attention des autorités depuis sa libération, ces circonstances, non plus que sa situation familiale, le fait qu'il exerce une activité professionnelle en tant qu'intérimaire et son apprentissage de la langue française, ne permettent de tenir pour acquis que sa présence en France ne constituait plus, à la date de la décision attaquée, une menace grave pour la société française.
SOURCE : Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 10/06/2021, 440383
JURISPRUDENCE :
Pour les modalités d'appréciation générales d'une telle menace, CE, 19 juin 2020, Office français de protection des réfugiés et apatrides c/ M.,, n° 428140, T. p. 610 :
« Il résulte de l'article L. 711-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) que la possibilité de refuser le statut de réfugié ou d'y mettre fin, 1) qui est sans incidence sur le fait que l'intéressé a ou conserve la qualité de réfugié dès lors qu'il en remplit les conditions, 2) est subordonnée à deux conditions cumulatives. Il appartient à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et, en cas de recours, à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), a) d'une part, de vérifier si l'intéressé a fait l'objet de l'une des condamnations que vise les dispositions de cet article et, b) d'autre part, d'apprécier si sa présence sur le territoire français est de nature à constituer, à la date de leur décision, une menace grave pour la société au sens de ces dispositions, c'est-à-dire si elle est de nature à affecter un intérêt fondamental de la société, compte tenu des infractions pénales commises - lesquelles ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une décision refusant le statut de réfugié ou y mettant fin - et des circonstances dans lesquelles elles ont été commises, mais aussi du temps qui s'est écoulé et de l'ensemble du comportement de l'intéressé depuis la commission des infractions ainsi que de toutes les circonstances pertinentes à la date à laquelle ils statuent. »