Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Un militaire publiant sous pseudonyme sur internet des articles critiquant l'action du Gouvernement manque-t-il à son obligation de réserve ?

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OUI : dans un arrêt en date du 27 juin 2018, le Conseil d’Etat a précisé que ces faits, même s'ils ont été commis sans utiliser les moyens du service et si l'intéressé ne faisait pas état de sa qualité de militaire, sont constitutifs d'une violation de l'obligation de réserve à laquelle sont tenus les militaires à l'égard des autorités publiques, même en dehors du service et fût-ce sous couvert d'anonymat.

Ces manquements sont constitutifs d'une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire.

M. B..., capitaine de gendarmerie, a publié, sous un pseudonyme, sur plusieurs sites internet relayés par les réseaux sociaux, de nombreux articles critiquant en des termes outranciers et irrespectueux l'action de membres du Gouvernement et la politique étrangère et de défense française.

Il s'est prévalu, dans ces publications, de sa qualité d'ancien élève de l'école Saint-Cyr et de l'école des officiers de la gendarmerie nationale.

Alors pourtant qu'il avait été mis en garde à ce sujet, il a poursuivi ces publications.

Ces faits, même s'ils ont été commis en dehors du service et sans utiliser les moyens du service et si l'intéressé ne faisait pas état de sa qualité de militaire, sont constitutifs d'une violation de l'obligation de réserve à laquelle sont tenus les militaires à l'égard des autorités publiques, même en dehors du service et fût-ce sous couvert d'anonymat.

Les manquements reprochés à M. C..., dont l'inexactitude matérielle n'est pas établie, étaient constitutifs d'une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire.

Aux termes de l'article L.4137-2 du code de la défense : « 1° Les sanctions du premier groupe sont : / a) L'avertissement ; / b) La consigne ; / c) La réprimande ; / d) Le blâme ; / e) Les arrêts ; / f) Le blâme du ministre ».

Eu égard à la virulence des propos tenus par l'intéressé, à la répétition des faits, au grade et aux responsabilités de M. C...et alors même que sa manière de servir aurait par ailleurs donné satisfaction, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire n'a pas, dans les circonstances de l'espèce et au regard de la marge d'appréciation dont elle disposait, pris une sanction disproportionnée en lui infligeant un blâme.

M. C...n'est pas fondé à soutenir qu'en sanctionnant les manquements, l'autorité disciplinaire aurait méconnu les stipulations de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui garantissent à toute personne le droit à la liberté d'expression et celui de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées, dès lors que la restriction apportée à sa liberté d'expression par l'obligation de réserve qui s'imposait à lui poursuit un but légitime, au sens de ces stipulations.

SOURCE : Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 27/06/2018, 412541

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