Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Une décision de non-reconduction à son terme d’une convention d’occupation tacitement reconductible est-elle assimilable à une résiliation ?

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NON : dans un arrêt en date du 08 juin 2018, le Conseil d’Etat considère qu’une telle décision ne constitue pas une mesure de résiliation de la convention d'occupation du domaine public, mais une décision de ne pas la reconduire lorsqu'elle serait parvenue à son terme initial, prise en vertu des stipulations contractuelle. Eu égard à la portée d'une telle décision, qui n'a ni pour objet, ni pour effet de mettre unilatéralement un terme à une convention en cours, le juge du contrat peut seulement rechercher si elle est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à une indemnité. Une demande tendant à la reprise des relations contractuelles est en l’espèce irrecevable.

La commune de Languidic et la société Orange ont signé, le 15 juin 2002, une convention autorisant, pour une durée de douze ans, l'installation, sur le château d'eau de Lanveur et sur une partie du terrain d'assiette de cet ouvrage, d'équipements techniques de radiotéléphonie mobile.

En vertu de son article 13, cette convention était reconductible de plein droit par périodes successives de deux ans, sauf dénonciation par l'une des parties, par lettre recommandée avec accusé de réception, six mois avant la date d'expiration de la période en cours.

Par un courrier du 28 novembre 2013, le président de la communauté d'agglomération Lorient Agglomération, substituée à la commune de Languidic à compter du 1er janvier 2012, a informé la société Orange que, faisant usage de la faculté qui lui était ouverte par son article 13, il s'opposait à la reconduction de la convention à son terme initial, soit à compter du 15 juin 2014.

Par un courrier du 23 juin 2014, il a rappelé à la société Orange la teneur de sa correspondance du 28 novembre 2013, lui a demandé de lui indiquer si elle souhaitait conclure une autre convention en vue de l'occupation du château d'eau de Lanveur et lui a précisé que, si tel n'était pas le cas, elle devait procéder, conformément à l'article 8 de la convention, au retrait de ses équipements, au plus tard le 15 juillet 2014.

La société Orange a saisi le tribunal administratif de Rennes de demandes par lesquelles, d'une part, elle contestait la validité de la décision du 28 novembre 2013 et demandait que soit ordonnée la reprise des relations contractuelles avec la communauté d'agglomération Lorient Agglomération et, d'autre part, elle contestait la validité de la mise en demeure du 23 juin 2014 de procéder au démontage des équipements de radiotéléphonie.

Par un jugement du 6 novembre 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ces demandes. La société Orange se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 3 avril 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté ses appels formés contre ce jugement.

Le juge du contrat, saisi par une partie d'un litige relatif à une mesure d'exécution d'un contrat, peut seulement, en principe, rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité.

Toutefois, une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles.

Il incombe au juge du contrat, saisi par une partie d'un recours de plein contentieux contestant la validité d'une mesure de résiliation et tendant à la reprise des relations contractuelles, lorsqu'il constate que cette mesure est entachée de vices relatifs à sa régularité ou à son bien-fondé, de déterminer s'il y a lieu de faire droit, dans la mesure où elle n'est pas sans objet, à la demande de reprise des relations contractuelles, à compter d'une date qu'il fixe, ou de rejeter le recours, en jugeant que les vices constatés sont seulement susceptibles d'ouvrir, au profit du requérant, un droit à indemnité.

La cour a relevé que la décision du 28 novembre 2013 ne constituait pas une mesure de résiliation de la convention d'occupation du domaine public, mais une décision de ne pas la reconduire lorsqu'elle serait parvenue à son terme initial, prise en vertu des stipulations de son article 13.

Eu égard à la portée d'une telle décision, qui n'a ni pour objet, ni pour effet de mettre unilatéralement un terme à une convention en cours, le juge du contrat peut seulement rechercher si elle est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à une indemnité.

Dès lors, en jugeant que la société Orange ne pouvait pas saisir le juge d'un recours en reprise des relations contractuelles et que les conclusions relatives à la décision du 28 novembre 2013 qu'elle avait présentées devant le tribunal administratif de Rennes étaient par suite irrecevables, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

Elle n'a pas davantage méconnu le droit à un recours juridictionnel.

 

SOURCE : Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 06/06/2018, 411053

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