Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Un militaire tenant des propos injurieux à l'égard de son supérieur sur le compte Facebook d’un collègue peut-il être sanctionné ?

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OUI : dans un arrêt en date du 22 septembre 2016, la Cour administrative d’appel de Nancy a jugé qu’en tenant des propos injurieux à l'égard de son supérieur hiérarchique sur la page personnelle du réseau social Facebook d'un collègue, un militaire a manqué à son devoir de loyauté et commis une faute de nature à justifier une sanction, quand bien même la diffusion de ses propos a été limitée au seul réseau de connaissances de sa collègue.

En l’espèce, il ne peut être reproché à l’employeur d’avoir méconnu le principe de loyauté dans l'administration de la preuve et porté atteinte au droit au respect de la vie privée et de la correspondance garanti par le droit européen.

En effet, les propos reprochés à l'intéressé ont été tenus dans le cadre d'une discussion susceptible d'être lue par toutes les personnes appartenant au réseau de connaissances de sa collègue et ayant accès à la page Facebook de cette dernière.

Mme B..., née le 15 avril 1993, a été recrutée dans la gendarmerie en qualité de gendarme adjoint volontaire et affectée, du 8 décembre 2011 au 31 janvier 2014, à la brigade territoriale autonome de Joigny ; que, par une décision du 28 janvier 2014, le commandant du groupement de gendarmerie départementale de l'Yonne lui a infligé une sanction de dix jours d'arrêts pour avoir proféré des insultes à l'encontre du commandant de brigade de Joigny.

Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé cette décision par un jugement du 3 mars 2015.

Le ministre de la défense relève appel de ce jugement.

Aux termes de l'article L.4137-2 du code de la défense : « Les sanctions disciplinaires applicables aux militaires sont réparties en trois groupes : 1° Les sanctions du premier groupe sont : a) L'avertissement ; b) La consigne ; c) La réprimande ; d) Le blâme ; e) Les arrêts ; f) Le blâme du ministre (...) ».

Aux termes de l'article R.4137-28 du même code : « Les arrêts sont comptés en jours. Le nombre de jours d'arrêts susceptibles d'être infligés pour une même faute ou un même manquement ne peut être supérieur à quarante (...) »

Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

Il ressort des pièces du dossier que, dans le courant du mois d'octobre 2013, Mme B ... s'est, à l'occasion d'une discussion sur la page personnelle du réseau social Facebook d'une collègue précédemment affectée à la même brigade qu'elle, exprimée en des termes injurieux à propos de son commandant de brigade.

Dans une note rédigée le 18 janvier 2014, elle a d'ailleurs reconnu avoir participé à la conversation et avoir proféré des insultes ; que la matérialité des faits reprochés à l'intéressée est établie.

En tenant des propos injurieux à l'égard de son supérieur hiérarchique, Mme B ... a manqué à son devoir de loyauté et commis une faute de nature à justifier une sanction, quand bien même la diffusion de ses propos a été limitée au seul réseau de connaissances de sa collègue.

L'autorité investie du pouvoir disciplinaire n'a pas, dans les circonstances de l'espèce et au regard du pouvoir d'appréciation dont elle disposait, pris une sanction disproportionnée en infligeant à Mme B ... une sanction du premier groupe de dix jours d'arrêts.

Par suite, le ministre de la défense est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a annulé la sanction au motif qu'elle était disproportionnée.

SOURCE : CAA de NANCY, 3ème chambre - formation à 3, 22/09/2016, 15NC00771, Inédit au recueil Lebon

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