Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

L’autorité doit-elle communiquer l’intégralité du dossier au militaire faisant l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office ?

Cet article est gratuit ! vous pouvez le consulter dans son intégralité
Toute la jurisprudence est disponible sur www.juripredis.com

OUI : et ce principe existe depuis 111 ans et pourtant … Dans un arrêt en date du 23 novembre 2016, le Conseil d’Etat rappelle qu'aux termes de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 : « Tous les fonctionnaires civils et militaires (...) ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, (...) avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office (...) ». 

L'autorité militaire de premier niveau a prononcé le 6 janvier 2016 une sanction de vingt jours d'arrêts à l'encontre de M.B..., commandant, exerçant les fonctions de chef de la section législation du bureau de la politique des ressources humaines de l'armée de terre, au motif que, alors « qu'une complicité profonde »  s'était développée entre lui-même et son adjointe, il a, «  par l'envoi de certains mails et SMS, dont le ton n'est clairement pas celui qu'un chef militaire doit employer à l'adresse d'un subordonné, (...) pu créer une certaine ambiguïté ».

« Fin novembre 2015, il est constaté une dégradation de la relation entre les deux commandants par une communication réduite et de réguliers accrochages verbaux, dégradation qui s'explique par la volonté de l'adjointe de mettre un terme à cette situation pour le moins ambigüe » et que M. B... « a fait preuve d'un manque de discernement certain en n'instaurant pas la relation nécessaire à de saines relations de supérieur à subordonné ».

D’autre part, par ordre de mutation du ministre de la défense émis le 26 janvier 2016, M. B...a été affecté d'office au centre de doctrine d'emploi des forces à compter du 28 janvier 2016 au motif que «  la cohabitation [entre le commandant est son adjointe] est définitivement impossible ».

Dans un arrêt en date du 23 novembre 2016, le Conseil d’Etat considère qu'aux termes de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 : « Tous les fonctionnaires civils et militaires (...) ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, (...) avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office (...) ».

En l’espèce, l'autorité militaire a sollicité les témoignages écrits des membres de la section législation que M. B...dirigeait afin d'apprécier les conséquences du comportement du commandant à l'égard de son adjointe.

Il est constant que ni le dossier disciplinaire communiqué le 18 décembre 2015 au requérant par l'auteur de la demande de sanction, ni le dossier de demande de déplacement d'office communiqué le 6 janvier 2016 à M. B...ne comportaient ces témoignages pourtant utiles à sa défense.

Ils auraient dû y figurer en application des dispositions précitées de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905.

Celles-ci ont donc été méconnues par l'autorité militaire ; que par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. B...est fondé à demander l'annulation des décisions de sanction et de mutation qu'il attaque.

Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M.B..., au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

SOURCE : Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 23/11/2016, 397733

Toute la jurisprudence est disponible sur www.juripredis.com

Chiffres clés
+ de 25 ansd’expérience
Une véritable base de données spécialisée dans le droit public
+ de 5000questions réponses
Paiement
100% sécurisé
+ de 200modèles téléchargeables