EN BREF : dans un arrêt en date du 18 novembre 2015, le Conseil d’Etat considère que lorsqu'une personne sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité, pour un vice de procédure, de la décision lui infligeant une sanction, il appartient au juge de plein contentieux, saisi de moyens en ce sens, de déterminer, en premier lieu, la nature de cette irrégularité procédurale puis, en second lieu, de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si, compte tenu de la nature et de la gravité de cette irrégularité procédurale, la même décision aurait pu être légalement prise, s'agissant tant du principe même de la sanction que de son quantum, dans le cadre d'une procédure régulière.
En l’espèce, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.B..., écroué à la maison centrale de Clairvaux, à Bayel, s'est vu infliger, par une décision de la commission de discipline de la maison centrale en date du 1er juin 2012, une sanction de douze jours de cellule disciplinaire, qui a été retirée, après avoir été exécutée, par le directeur interrégional des services pénitentiaires pour un motif d'irrégularité de procédure.
M. B... a demandé à la garde des sceaux, ministre de la justice, l'indemnisation du préjudice qu'il estime avoir subi en raison de l'illégalité de cette décision.
Il se pourvoit en cassation contre le jugement par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande d'indemnisation.
Dans son arrêt en date du 18 novembre 2015, le Conseil d’Etat considère que lorsqu'une personne sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité, pour un vice de procédure, de la décision lui infligeant une sanction, il appartient au juge de plein contentieux, saisi de moyens en ce sens, de déterminer, en premier lieu, la nature de cette irrégularité procédurale puis, en second lieu, de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si, compte tenu de la nature et de la gravité de cette irrégularité procédurale, la même décision aurait pu être légalement prise, s'agissant tant du principe même de la sanction que de son quantum, dans le cadre d'une procédure régulière.
Il suit de là qu'en jugeant que M. B... n'était pas fondé à réclamer une indemnisation au titre de l'irrégularité de la procédure tenue devant la commission de discipline, sans avoir recherché au préalable ni la nature de cette irrégularité, ni si elle était susceptible d'avoir exercé une influence sur le principe ou le quantum de la sanction retenue, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a entaché son jugement d'erreur de droit.
Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.
SOURCE : Conseil d'État, 10ème / 9ème SSR, 18/11/2015, 380461, Publié au recueil Lebon
JURISPRUDENCE :
Conseil d'Etat, Section, du 19 juin 1981, 20619, publié au recueil Lebon
« Refus d'autorisation illégal en raison de la composition irrégulière de la commission appelée à donner un avis conforme - Responsabilité de l'Etat - Absence dès lors que le refus était justifié. »
Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 07/06/2010, 312909
« Si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de la collectivité publique, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise. En l'espèce, il n'est pas établi que la punition de 15 jours d'arrêts retirée par le ministre pour vice de procédure, en raison de l'absence de communication au militaire des pièces du dossier, aurait pu être légalement prise, même si la procédure avait été régulière. Le militaire a donc droit à l'indemnisation de son préjudice moral du fait de cette décision illégale. »
Conseil d'État, Assemblée, 23/12/2011, 335033, Publié au recueil Lebon
(Jurisprudence dite « Danthony ».
« Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; que l'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'acte ; »