Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Une expertise suspend-elle le délai de contestation du décompte général d’un marché public de travaux ?

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NON : dans un arrêt en date du 18 septembre 2015, le Conseil d’Etat considère que la cour administrative d’appel de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que ni la saisine du juge des référés du tribunal administratif aux fins de voir ordonner une expertise, ni le dépôt du rapport d'expertise n'avaient eu pour effet de suspendre le délai de six mois prévu à l'article 50.32 du CCAG-Travaux et que le juge des référés saisi d'une demande d'expertise n'était pas le tribunal administratif compétent pour régler le litige mentionné par l'article 50.32 du CCAG-Travaux.

L'article 50.32 du CCAG-Travaux dispose que « Pour les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, le titulaire dispose d'un délai de six mois, à compter de la notification de la décision prise par le représentant du pouvoir adjudicateur en application de l'article 50.1.2, ou de la décision implicite de rejet conformément à l'article 50.1.3, pour porter ses réclamations devant le tribunal administratif compétent. »

L'article 50.1.2. du CCAG-Travaux dispose qu’ « Après avis du maître d'œuvre, le représentant du pouvoir adjudicateur notifie au titulaire sa décision motivée dans un délai de quarante-cinq jours à compter de la date de réception du mémoire en réclamation. »

L'article 50.1.3. du CCAG-Travaux dispose que « L'absence de notification d'une décision dans ce délai équivaut à un rejet de la demande du titulaire. »

La société Avena BTP et le centre hospitalier de Grasse ont conclu, en 2006, un marché public de travaux pour la construction d'un bâtiment de ce centre.

La société Avena BTP a refusé d'accepter le décompte général présenté par le centre hospitalier et, après le rejet d'une partie de ses réclamations en février 2009, saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nice le 7 juillet 2009, lequel a ordonné une expertise.

Elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a confirmé le jugement du tribunal administratif de Nice qui, saisi le 19 avril 2010, a notamment rejeté ses demandes relatives au solde de ce marché.

Aux termes de l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales - Travaux publics (CCAG-Travaux) en vigueur à la date du marché en cause et applicable à celui-ci ainsi qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond : « Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable. Toutefois, le délai de six mois est suspendu en cas de saisine du comité consultatif de règlement amiable dans les conditions du 4 du présent article. »

La procédure de réclamation préalable prévue par l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales - Travaux publics, notamment le respect du délai de six mois pour saisir le juge du contrat à compter de la notification à l'entrepreneur de la décision prise sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général, résulte des clauses contractuelles auxquelles les parties ont souscrit.

Elles ont organisé de la sorte, ainsi qu'elles le pouvaient, des règles particulières de saisine du juge du contrat ; que ces stipulations ne prévoient aucune cause d'interruption de ce délai ni d'autres cas de suspension que la saisine du comité consultatif de règlement amiable.

Par suite, en jugeant que les dispositions du code civil qui étaient invoquées devant elle n'étaient pas applicables au litige entre les parties relatif au décompte, exclusivement régi sur ce point par les stipulations citées ci-dessus du CCAG, la cour n'a, en tout état de cause, pas commis d'erreur de droit.

Dans son arrêt en date du 18 septembre 2015, le Conseil d’Etat considère que la cour n'a pas davantage commis d'erreur de droit en jugeant que ni la saisine du juge des référés du tribunal administratif aux fins de voir ordonner une expertise, ni le dépôt du rapport d'expertise n'avaient eu pour effet de suspendre le délai de six mois prévu à l'article 50.32 du CCAG-Travaux et que le juge des référés saisi d'une demande d'expertise n'était pas le tribunal administratif compétent pour régler le litige mentionné par l'article 50.32 du CCAG-Travaux.

Il résulte de ce qui précède que la société Avena BTP n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué, qui est suffisamment motivé.

SOURCE : Conseil d'État, 7ème / 2ème SSR, 18/09/2015, 384523, Inédit au recueil Lebon

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