Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Un fonctionnaire peut-il cumuler une activité accessoire publique autorisée en contrat à durée indéterminée ?

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NON : car les cumuls d'activité ne peuvent être autorisés que pour une durée limitée. Dans un arrêt en date du 27 mai 2010, la Cour administrative d’appel de Nancy a jugé qu’eu égard à l'objectif de lutte contre la précarité ainsi poursuivi, les dispositions de l'article 13 de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 prévoyant que l'agent non titulaire en fonction depuis six ans au moins à la date de publication de la loi ne peut être reconduit que pour une durée indéterminée ne sont pas applicables aux activités accessoires des fonctionnaires exercées sous forme de contrats à durée déterminée. En effet, l’article 8 du décret n°2007-658 du 2 mai 2007 relatif au cumul d'activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l'Etat, aujourd’hui applicable,  dispose que : « L'autorité dont relève l'agent peut s'opposer à tout moment à la poursuite d'une activité dont l'exercice a été autorisé, dès lors que l'intérêt du service le justifie, que les informations sur le fondement desquelles l'autorisation a été donnée apparaissent erronées ou que l'activité en cause ne revêt plus un caractère accessoire. » (Voir Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, 10 juin 2010, M.X, n° 0800684, LIJ n° 148, octobre 2010, p. 22-23, concernant une quotité de dix heures d’enseignement dans un Greta, pour un professeur  certifié assurant un service hebdomadaire de dix-huit  heures dans le cadre de son activité principale.)

M. A, maître de conférences, a en outre exercé à temps partiel les fonctions d'assistant du laboratoire de biochimie appliquée, sous forme de contrats à durée déterminée conclus successivement avec l'Université Louis Pasteur de Strasbourg à compter du 1er janvier 2000 et jusqu'au 30 juin 2006.

Par décision du 27 avril 2006, le président de l'Université Louis Pasteur a décidé de ne pas renouveler le contrat arrivant à échéance le 3 juin 2006.

M. A conclut à l'annulation de ladite décision et à l'indemnisation du préjudice subi.

Aux termes de l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, dans sa rédaction alors en vigueur : « I. Les fonctionnaires consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées... Les conditions dans lesquelles il peut être exceptionnellement dérogé à cette interdiction sont fixées par décret en Conseil d'Etat... ; »

Aux termes de l'article 9 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984, dans sa rédaction applicable en l'espèce : «  Les enseignants chercheurs doivent la totalité de leur temps de service à la réalisation des différentes activités qu'impliquent leurs fonctions. En matière de cumuls d'emplois et de cumuls de rémunérations publiques ou privées, ils sont soumis aux dispositions législatives et réglementaires applicables à l'ensemble des agents de la fonction publique... ; »

Enfin, aux termes de l'article 7 du décret-loi du 29 octobre 1936 susvisé alors en vigueur : « Nul ne peut exercer simultanément plusieurs emploi rémunérés sur les budgets des collectivités visées par l'article 1er... Les cumuls autorisés auront une durée limitée... et ne devront en aucun cas préjudicier à l'exercice de la fonction principale... ; »

M. A soutient que, dès lors qu'il était en fonction depuis au moins six ans, son dernier contrat, conclu pour la période du 1er janvier au 30 juin 2006, devait être requalifié en contrat à durée indéterminée sur le fondement de l'article 13 de la loi susvisée du 26 juillet 2005, qui dispose que : « (...) Lorsque, à la date de publication de la présente loi, l'agent est en fonction depuis six ans au moins, de manière continue, son contrat ne peut, à son terme, être reconduit que pour une durée indéterminée... (…) » et qu'ainsi, la décision attaquée serait illégale en tant qu'il était devenu titulaire d'un contrat à durée indéterminée à la date du 30 juin 2006 à laquelle a pris fin son dernier contrat.

Dans un arrêt en date du 27 mai 2010, la Cour administrative d’appel de Nancy a jugé toutefois que les dispositions précitées de la loi du 26 juillet 2005, insérées dans le chapitre III intitulé Lutte contre la précarité , ayant pour but de stabiliser la situation des agents contractuels et, à cette fin, de limiter le recours aux contrats à durée déterminée dans la fonction publique, conformément aux objectifs de la directive susvisée du 28 juin 1999 dont ladite loi vise à assurer la transposition, doivent être regardées comme ne s'appliquant pas aux activités accessoires des fonctionnaires.

Au surplus, ainsi que le mentionnent d'ailleurs ses contrats, l'activité accessoire de M. A s'exerçait dans le cadre des dispositions sus rappelées du décret du 29 octobre 1936, lesquelles disposent, comme il vient d'être mentionné, que les cumuls d'activité ne peuvent être autorisés que pour une durée limitée.

Il appartient au demeurant à l'administration d'apprécier, dans l'intérêt du service, l'opportunité de renouveler une autorisation de cumul d'emplois venue à expiration.

Ainsi, l'application des dispositions précitées de la loi du 26 juillet 2005 serait en tout état de cause incompatible tant avec la faculté dont dispose l'administration de ne pas renouveler une autorisation de cumul d'emplois qu'avec le caractère accessoirement limité dans le temps de cette autorisation.

Il s'ensuit que M. A n'est pas fondé à demander la requalification de son dernier contrat en contrat à durée indéterminée.

L'intéressé ne conteste par ailleurs pas le bien-fondé du motif pour lequel l'Université a mis fin à son contrat, tiré de ce que l'activité d'analyse qu'il exerçait était transférée aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg à compter du 1er juillet 2006.

Ainsi, sans qu'il soit besoin pour la Cour de poser à la Cour de justice de l'Union européenne, en application de l'article 267 du traité de l'Union européenne, une question préjudicielle concernant la validité de la loi du 26 juillet 2005 en tant qu'elle devrait être regardée comme excluant les fonctionnaires du champ d'application de son titre III, c'est à juste titre que, quelque puisse être la pertinence des motifs qu'il a cru devoir retenir à cet égard, le tribunal a rejeté les conclusions de M. A tendant à l'annulation de ladite décision.

SOURCE : Cour Administrative d'Appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 27/05/2010, 09NC00539

A LIRE : « Le cumul d'activités » - LIJ n° 165 - mai 2012 - pages 21-24.

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