Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Le fonctionnaire territorial en congé de longue maladie ou de longue durée peut-il travailler pour raison thérapeutique ?

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OUI : le bénéficiaire d'un congé de longue maladie ou de longue durée doit cesser tout travail rémunéré, sauf les activités ordonnées et contrôlées médicalement au titre de la réadaptation, non assimilables à des fonctions exercées à temps partiel thérapeutique. L'article 28 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 prévoit ainsi que l'agent en congé de longue maladie ou de longue durée peut pratiquer « les activités ordonnées et contrôlées médicalement au titre de la réadaptation ». La réponse  du Ministère de la Décentralisation et fonction publique à la question écrite n° 60133 de Monsieur le Député Edouard Philippe (Les Républicains - Seine-Maritime ) publiée au JOAN le : 31/03/2015 page : 2496, précise que « cette activité doit faire l'objet d'une prescription délivrée par un médecin. Ainsi, en cas d'accord entre l'administration, l'agent, le médecin de prévention et le médecin traitant de l'agent, voire le cas échéant après avis du comité médical ou de la commission de réforme, l'agent peut être admis à exercer une activité minime dans son administration et sous contrôle médical, en vue d'une réadaptation professionnelle. Il ne s'agit pas d'un exercice des fonctions à temps partiel thérapeutique ni même d'une étape préalable à l'examen d'une éventuelle inaptitude au poste ou aux fonctions du fonctionnaire. Par exemple, les activités ordonnées et contrôlées médicalement peuvent conduire à ce que l'agent reprenne une activité de très faible importance dans son service afin d'éviter un risque de désinsertion professionnelle. L'agent demeure placé en congé de longue maladie ou de longue durée et perçoit en conséquence la rémunération afférente à cette situation administrative. »

1) En principe le fonctionnaire territorial en congé pour raison de santé doit cesser tout travail rémunéré …

L'article 28 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux pose pour principe que le bénéficiaire d'un congé de longue maladie ou de longue durée doit cesser tout travail rémunéré.

Il n'est en conséquence pas envisageable que la collectivité ayant accordé le congé pour raison de santé continue à employer l'agent pendant son interruption de travail, y compris sur un autre poste que celui occupé avant cette interruption.

Appelée à se prononcer sur un tel cas d'espèce, la Cour administrative d'appel de Versailles a ainsi rappelé à propos d’un fonctionnaire de La Poste, « qu'un fonctionnaire ne peut exercer, lorsqu'il est placé en congé de maladie ou de longue maladie, un travail rémunéré » (arrêt n° 03VE01708 du 13 décembre 2005).

SOURCE : Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème Chambre, du 13 décembre 2005, 03VE01708, inédit au recueil Lebon

« Considérant qu'il résulte de l'instruction, comme il a été dit ci-dessus, que M. X a exercé une activité rémunérée pendant son congé de maladie ; que si le requérant soutient que l'exercice de cette activité a été ordonné par la Poste, il n'établit en tout état de cause, ni qu'il aurait été contraint d'exercer cette activité rémunérée, ni que la direction de la Poste des Yvelines connaissait son activité rémunérée ; que s'il prétend pour la première fois en appel que l'activité concernée aurait été exercée par sa femme, il ne l'établit pas ; que l'absence de sanction disciplinaire n'est pas de nature à établir l'absence d'activité rémunérée ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles l'a condamné à reverser à l'établissement public La Poste le montant des salaires perçus au cours de la période allant du 20 mai 1992 au 31 décembre 1994 à l'exception de la période allant du 6 juin 1994 au 26 juin 1994, assorti des intérêts au taux légal et de la capitalisation desdits intérêts ; que, par suite, sa requête doit être rejetée ;»

L'article 28 du décret précité prévoit une seule exception : l'agent en congé de longue maladie ou de longue durée peut pratiquer « les activités ordonnées et contrôlées médicalement au titre de la réadaptation ».

Le juge administratif a précisé à propos d’un fonctionnaire de La Poste, que « la simple recommandation médicale d'exercer une activité ne saurait faire regarder celle-ci comme ordonnée et contrôlée » (CAA Nancy 5 juillet 2010, req. n° 09NC01630).

SOURCE : Cour Administrative d'Appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 05/07/2010, 09NC01630, Inédit au recueil Lebon

« Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a, alors qu'il était en congé de longue maladie, travaillé dans le restaurant dont son père était le gérant statutaire ; que ce restaurant poursuivait un objet lucratif ; que la double circonstance, d'une part, que la contribution du requérant à la gestion dudit restaurant n'aurait eu qu'un caractère occasionnel, d'autre part, que l'intéressé n'aurait pas été rémunéré au cours de la période concernée, n'est pas de nature à retirer à cette activité son caractère lucratif au sens des dispositions précitées ; que la circonstance que l'intéressé aurait participé au fonctionnement de ce restaurant sur les conseils de son médecin n'est en tout état de cause pas de nature à remettre en cause la qualification d'activité privée lucrative ; que ces faits sont constitutifs d'une faute de nature à justifier le prononcé d'une sanction disciplinaire à l'encontre de M. A ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal aurait commis une erreur de droit doit être écarté ;


Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un article de presse du 6 avril 2001, de la lettre de l'intéressé du 15 janvier 2002, du constat d'huissier dressé le 19 juillet 2002 à la demande de France Télécom et du rapport d'intervention du 29 novembre 2002 de l'enquêteur spécialisé de France Télécom, auquel sont annexés les déclarations d'une ancienne serveuse ainsi que plusieurs témoignages de clients non sérieusement contredits par M. A, que ce dernier a, même si la permanence de cette activité n'est pas établie, contribué pour le moins fréquemment au fonctionnement d'un petit restaurant dont son père était le gérant statutaire ; qu'il ressort toutefois d'un certificat médical de son médecin traitant que celui-ci lui avait conseillé, eu égard à la nature de son affection, de ne pas rester chez lui et lui avait notamment ménagé à cet effet des horaires de sortie du domicile totalement libres dans un but de réadaptation médicale au travail ; que, dans ces circonstances, compte tenu de ce que, comme il a été dit ci-dessus, l'intéressé n'a pas été rémunéré pour cette activité, et alors même que, comme le souligne France Télécom, la simple recommandation médicale d'exercer une activité ne saurait faire regarder celle-ci comme ordonnée et contrôlée médicalement au sens des dispositions précitées de l'article 38 du décret du 14 mars 1986, M. A est fondé à faire valoir que la décision de révocation prise à son encontre présente une disproportion manifeste par rapport aux faits qui lui sont reprochés ; qu'ainsi, ladite décision doit être annulée ; »

Il en résulte que cette activité doit faire l'objet d'une prescription délivrée par un médecin.

2) Mais en cas d'accord entre l'administration, l'agent, le médecin de prévention et le médecin traitant de l'agent, voire le cas échéant après avis du comité médical ou de la commission de réforme, l'agent peut être admis à exercer une activité minime dans son administration et sous contrôle médical, en vue d'une réadaptation professionnelle.

Il ne s'agit pas d'un exercice des fonctions à temps partiel thérapeutique ni même d'une étape préalable à l'examen d'une éventuelle inaptitude au poste ou aux fonctions du fonctionnaire.

Par exemple, les activités ordonnées et contrôlées médicalement peuvent conduire à ce que l'agent reprenne une activité de très faible importance dans son service afin d'éviter un risque de désinsertion professionnelle.

L'agent demeure placé en congé de longue maladie ou de longue durée et perçoit en conséquence la rémunération afférente à cette situation administrative.

SOURCE : réponse du Ministère de la Décentralisation et fonction publique à la question écrite n° 60133 de Monsieur le Député Edouard Philippe (Les Républicains - Seine-Maritime ) publiée au JOAN le : 31/03/2015 page : 2496.

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