Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Le président du CNESER doit-il rouvrir l'instruction en cas de dépôt d'un mémoire contenant des éléments nouveaux après le dépôt du rapport de la commission d'instruction ?

Cet article est gratuit ! vous pouvez le consulter dans son intégralité
Toute la jurisprudence est disponible sur www.juripredis.com

OUI : dans son arrêt en date du 8 juin 2015, le Conseil d'Etat considère que la production du premier mémoire en défense, postérieurement au dépôt du rapport de la commission d'instruction, qui discutait de manière substantielle l'ensemble des faits reprochés au mis en cause et comportait certains éléments supplémentaires par rapport à ceux déjà débattus en première instance, devait être regardé comme comportant des éléments nouveaux au sens des dispositions de l'article R.232-37 du code de l'éducation, obligeant ainsi le président du conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) de rouvrir l'instruction. Il appartenait, dès lors, au président du CNESER de rouvrir l'instruction. Au surplus, cette production n'a été communiquée au mis en cause que moins de 48 heures avant l'audience disciplinaire, ce qui l'a privé d'un délai suffisant pour préparer utilement sa défense. Méconnaissance des droits de la défense.

Aux termes de l'article R.232-37 du code de l'éducation, qui fixe la procédure applicable devant le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire : « La commission d'instruction entend la personne déférée et instruit l'affaire par tous les moyens qu'elle juge propres à l'éclairer et en fait un rapport écrit comprenant l'exposé des faits et moyens des parties. Ce rapport est transmis au président dans un délai qu'il a préalablement fixé et qui ne peut être supérieur à trois mois. Toutefois, le président peut ordonner un supplément d'instruction s'il estime que l'affaire n'est pas en état d'être jugée. Le rapport et les pièces des dossiers sont déposés par le rapporteur au secrétariat du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche pour être tenus à la disposition des parties, de leur conseil et des membres du conseil statuant en matière disciplinaire, dix jours francs avant la date fixée pour la séance du jugement. (...) / Dans le cas où la juridiction est saisie de nouveaux éléments, le président ordonne la réouverture de l'instruction qui se déroule selon les formes prescrites à l'alinéa précédent du présent article »

Aux termes de l'article R.232-38 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce : « Le président du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire convoque chacune des personnes intéressées devant la formation de jugement par lettre recommandée, avec demande d'avis de réception, quinze jours au moins avant la date de la séance de jugement. (...) / Au jour fixé pour la séance, un secrétaire est désigné en leur sein par les enseignants-chercheurs siégeant dans la formation de jugement. Le rapport de la commission d'instruction est lu par le rapporteur ou, en cas d'absence de celui-ci, par le secrétaire. S'il l'estime nécessaire, le président peut entendre des témoins à l'audience. Sur sa demande, le président ou le directeur d'un établissement mentionné aux articles 2 et 3 du décret n° 92-657 du 13 juillet 1992 cité à l'article R.232-33 ou son représentant, est entendu ainsi que le recteur d'académie ou son représentant, s'il est l'auteur des poursuites disciplinaires ou de l'appel. La personne déférée et son conseil sont entendus dans leurs observations. La personne déférée a la parole en dernier (...) »

Dans son arrêt en date du 8 juin 2015, le Conseil d'Etat considère qu'il ressort des pièces du dossier soumis au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche que le recteur de l'académie de Nice a produit son premier mémoire en défense devant cette juridiction postérieurement au dépôt du rapport de la commission d'instruction. Ce mémoire, qui discutait de manière substantielle l'ensemble des faits reprochés à M. A... et comportait certains éléments supplémentaires par rapport à ceux déjà débattus en première instance, devait être regardé comme comportant des éléments nouveaux au sens des dispositions citées ci-dessus de l'article R.232-37 du code de l'éducation. Conformément à ces dispositions, il appartenait, dès lors, au président du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche de rouvrir l'instruction. Au surplus, cette production n'a été communiquée à M. A... que le 9 juillet 2012, moins de 48 heures avant l'audience disciplinaire du 11 juillet 2012, ce qui l'a privé d'un délai suffisant pour préparer utilement sa défense. Que, dès lors, celui-ci est fondé à soutenir que le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche a méconnu les droits de la défense et à demander, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, l'annulation de la décision qu'il attaque.  

SOURCE : Conseil d'État, 4ème / 5ème SSR, 08/06/2015, 365205

Toute la jurisprudence est disponible sur www.juripredis.com

Chiffres clés
+ de 25 ansd’expérience
Une véritable base de données spécialisée dans le droit public
+ de 5000questions réponses
Paiement
100% sécurisé
+ de 200modèles téléchargeables