Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Une indemnité de départ volontaire illégale peut-elle être retirée plus de 4 mois après son attribution ?

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NON : si la décision illégale d'attribution de l'indemnité de départ volontaire  (IDV) n'a pas été retirée dans le délai de quatre mois, ce délai étant parfois difficile à respecter compte tenu de la séparation de l'ordonnateur et du comptable. Dans cette espèce, c'est le comptable public, qui a juste titre, s'est aperçu de l'illégalité de la décision du maire, s'agissant d'un agent contractuel. Mais l'administration a tardé à retirer sa décision illégale, et en application de la jurisprudence du Conseil d'Etat TERNON, du 26 octobre 2001, la Cour administrative d'appel de Paris, dans son arrêt du 2 avril 2015, a jugé qu' un  maire qui n'a pas requis le comptable qui a refusé de payer à un fonctionnaire une indemnité de départ volontaire, au motif que l'octroi de cette indemnité n'étaient pas permises par la réglementation en vigueur , et qui n'a effectué aucune démarche en vue d'obtenir le paiement de indemnité à l'agent, doit être regardé comme ayant décidé de retirer sa décision, laquelle était créatrice de droits, car un délai de quatre mois suivant son édiction s'était écoulé (arrêté d'attribution du 20 janvier 2011 et le retrait était possible avant le 20 mai 2011), et illégale dès lors que le versement d'une telle indemnité de départ volontaire n'était pas prévu par le contrat de droit public qui liait cet agent à la commune. Et « cerise sur le gâteau » les juges de la Cour administrative d'appel de Paris ont considéré que la décision de retrait de l'indemnité accordée était entachée d'une rétroactivité illégale constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune.

En l'espèce, M.B..., employé depuis 1978 par la commune de Punaauia, est parti à la retraite le 31 mars 2011. Il relève appel du jugement du 24 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Punaauia à lui verser une somme de 8 061 666 F CFP, en réparation du préjudice causé par le refus de la commune de lui verser une indemnité de même montant, en contrepartie de son départ volontaire à la retraite.

En effet, par arrêté du 20 janvier 2011, le maire de Punaauia a décidé d'accorder à M. B... le bénéfice des dispositions de la délibération n° 70/09 du 12 juin 2009, laquelle prévoyait le versement au profit des agents communaux ayant décidé de cesser volontairement leur activité d'une indemnité de départ égale à la moitié du salaire moyen des six derniers mois multiplié par le nombre d'années d'ancienneté.

Le maire a donc ordonnancé cette dépense.

Mais le comptable public a refusé d'en exécuter le règlement au motif que les indemnités de départ volontaire instituées par la commune n'étaient pas permises par la réglementation en vigueur.

Le maire de Punaauia n'a pas requis le comptable, comme les dispositions combinées des articles L.1617-3 et L.1874-1 du code général des collectivités territoriales lui en ouvraient la possibilité, et n'a effectué aucune démarche en vue d'obtenir le paiement de cette indemnité à M.B....

Il doit être regardé, par suite, comme ayant décidé de retirer sa décision du 20 janvier 2011 d'octroi d'une indemnité de départ volontaire à M. B..., laquelle décision était créatrice de droits, et illégale dès lors que le versement d'une telle indemnité de départ volontaire n'était pas prévu par le contrat de droit public qui, en vertu de l'article 73 de l'ordonnance du 4 janvier 2005 susvisée, liait cet agent à la commune.

Cependant, le maire ne pouvait retirer cette décision que dans le délai de quatre mois suivant son édiction.

En effet, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; qu'une décision administrative explicite accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage.

Il ne résulte d'aucune des pièces du dossier et n'est pas allégué par la commune qu'il aurait décidé de retirer cette décision antérieurement au 20 mai 2011.

Sa décision de retrait de l'indemnité accordée à M. B... est, par suite, entachée d'une rétroactivité illégale.

Cette illégalité est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Punaauia.

SOURCE : CAA de PARIS, 9ème Chambre, 02/04/2015, 14PA01324, Inédit au recueil Lebon 

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