Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Un cabinet d’avocats peut-il faire travailler ses avocats salariés le dimanche?

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NON : dans un arrêt en date du 15 décembre 2015, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé qu’en dépit de l’absence de décret spécifique aux salariés du secteur libéral, le cadre général défini par le code du travail était suffisamment clair pour être applicable aux salariés d’un cabinet d’avocat. Au soutien de son pourvoi, le cabinet d’avocats et son dirigeant faisaient valoir que les dispositions de l’article L.8112-4 du code du travail édictent qu’un décret déterminera les modalités d’application des dispositions du présent code aux salariés des professions libérales. Or, ce décret n’ayant  jamais été publié, les demandeurs en avaient déduit que les dispositions du code du travail prohibant le travail des salariés le dimanche n’étaient pas applicables au secteur d’activité concerné… Moralité, il faut embaucher uniquement des avocats collaborateurs qui exercent en libéral et en contrepartie, leur laisser développer une clientèle personnelle... Mais on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre … Mais le petit avocat libéral individuel de banlieue parisienne ou d'ailleurs est obligé de travailler le dimanche pour payer ses charges ... et dans l'indifférence générale.

Le dimanche 29 mai 2011, des inspecteurs du travail se sont rendus dans les locaux de la société X, dont l'activité est l'exercice de la profession d'avocat et ont constaté la présence de vingt-cinq salariés au sein du département assurant la gestion de la fiscalité et les déclarations fiscales des particuliers.

Le 1er juin suivant, un inspecteur du travail s'est déplacé dans les locaux d'une société prestataire du marché de sécurité des locaux de la société X  et s'est fait remettre le relevé des badges d'accès auxdits locaux, révélant la présence de treize autres salariés le dimanche 29 mai, celle de trente et un salariés le dimanche 22 mai 2011 et de vingt-six salariés le 15 mai 2011.

A la suite des constats de l'inspection du travail et de l'enquête diligentée, la société  X et son directeur général, M. X..., ont été poursuivis pour avoir, en violation des articles L.3132-2 et L.3132-3 du code du travail, omis de donner le repos dominical à ces salariés les 15 mai 2011, 22 mai 2011 et 29 mai 2011, contraventions réprimées par l'article R.3135-2 dudit code. Le tribunal de police a renvoyé les prévenus des fins de la poursuite.

C’est sur la base des procès-verbaux dressés ce jour-là que la chambre correctionnelle de la cour d’appel de Versailles , par un arrêt rendu le 16 juin 2014 a condamné la société d’avocats à vingt-cinq amendes de 150 € chacune et le dirigeant de la société à vingt-cinq amendes de 150 € chacune avec sursis pour infraction à la règle du repos dominical.  La société d’avocats et son dirigeant se sont pourvus en cassation contre la décision les condamnant.

Au soutien de son pourvoi, le cabinet d’avocats et son dirigeant faisaient valoir que les dispositions de l’article L.8112-4 du code du travail édictent qu’un décret déterminera les modalités d’application des dispositions du présent code aux salariés des professions libérales.

Or, ce décret n’a jamais été publié. Les demandeurs en déduisaient que les dispositions du code prohibant le travail des salariés le dimanche n’étaient pas applicables au secteur d’activité concerné.

La cour d’appel avait écarté le moyen et considéré que les missions des inspecteurs du travail étaient définies en termes suffisamment clairs par les dispositions de l’article L.8112-1, qui ne font aucune distinction en fonction du secteur d’activité dans lequel opère l’employeur.

Ainsi, en dépit de l’absence de décret spécifique aux salariés du secteur libéral, le cadre général défini par le code du travail était suffisamment clair pour être applicable aux salariés d’un cabinet d’avocat. La chambre criminelle a rejeté l’argument des demandeurs et approuvé les juges du fond qui ont considéré que les missions des services de l’inspection du travail étaient définies de manière suffisamment claire. Aucun décret n’était nécessaire pour les appliquer.

SOURCE : Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 15 décembre 2015, 14-85.261, Inédit

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