Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Marché public : que doit vérifier le juge du référé précontractuel lorsque le candidat est une personne morale de droit public ?

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EN BREF : dans un arrêt en date du 18 septembre 2015, le Conseil d’Etat considère que lorsque le candidat est une personne morale de droit public, il appartient au juge du référé précontractuel, saisi de moyens sur ce point, de vérifier que l'exécution du contrat en cause entrerait dans le champ de sa compétence et, s'il s'agit d'un établissement public, ne méconnaîtrait pas le principe de spécialité auquel il est tenu. Un établissement public ne méconnaît pas le principe de spécialité en candidatant à un marché dont l'objet constitue un complément normal de sa mission statutaire.

Aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : « Le président du tribunal administratif, ou son délégué, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics (...) Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par ce manquement (...). Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du marché ou l'exécution de toute décision qui s'y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations (...). Le président du tribunal administratif ou son délégué statue en premier et dernier ressort en la forme des référés »

La commune de Brie a lancé, le 1er juillet 2014, une procédure négociée en vue de faire réaliser des études d'urbanisme portant sur la création d'une zone d'aménagement concerté.

L'offre du groupement composé des sociétés URBéA et Atelier Bouvier Environnement, Gwenaël Desnos et de l'association de gestion du Conservatoire national des arts et métiers des Pays de la Loire, a été retenue par une délibération du 16 mars 2015 du conseil municipal de Brie.

Par une ordonnance du 22 avril 2015, le juge du référé précontractuel a, sur la demande de la SARL Sitadin Urbanisme et Paysage et de la SCP Garnier et autres, annulé cette procédure à compter de l'examen des candidatures.

Le groupement attributaire et l'association de gestion du Conservatoire national des arts et métiers des Pays de la Loire se pourvoient en cassation contre cette ordonnance.

Pour annuler la procédure litigieuse, le juge du référé précontractuel a accueilli le moyen tiré de ce qu'il n'entre pas dans la mission de service public d'enseignement et de recherche du Conservatoire national des arts et métiers, établissement public, de délivrer des prestations de conseil juridique en droit de l'urbanisme.

Dans son arrêt en date du 18 septembre 2015, le Conseil d’Etat considère qu'il appartient au juge du référé précontractuel, saisi de moyens sur ce point, de s'assurer que l'appréciation portée par le pouvoir adjudicateur pour exclure ou admettre une candidature ne constitue pas un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Dans ce cadre, lorsque le candidat est une personne morale de droit public, il lui incombe de vérifier que l'exécution du contrat en cause entrerait dans le champ de sa compétence et, s'il s'agit d'un établissement public, ne méconnaîtrait pas le principe de spécialité auquel il est tenu.

En l’espèce, il ressort toutefois des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Rennes que c'est l'association de gestion du Conservatoire national des arts et métiers des Pays de la Loire, personne morale de droit privé, qui était membre du groupement attributaire du marché litigieux et non l'établissement public lui-même.

Ainsi, le juge des référés, qui s'est fondé sur la méconnaissance, par l'établissement public Conservatoire national des arts et métiers, du principe de spécialité, en se bornant, au surplus, à prendre en compte l'objet statutaire de cet établissement, sans rechercher si les prestations objet du marché constituaient le complément normal de sa mission statutaire et étaient utiles à l'exercice de celle-ci, a commis une erreur de droit.

Sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi, les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée.

SOURCE : Conseil d'État, 7ème / 2ème SSR, 18/09/2015, 390041

JURISPRUDENCE :

Conseil d’Etat, Section des travaux publics, avis, 7 juillet 1994, n° 356089.  

Conseil d'Etat, 7 / 5 SSR, du 21 juin 2000, 209319, publié au recueil Lebon

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