Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

L’émotion et les inquiétudes résultant d’attentats terroristes peuvent-elles permettre à un maire d’interdire le port du « burkini » sur les plages de sa commune ?

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NON : dans une ordonnance du 26 août 2016, le Juge des référés du Conseil d’Etat précise qu’en l’absence de risques de trouble à l’ordre public, l’émotion et les inquiétudes résultant des attentats terroristes, notamment de celui commis à Nice le 14 juillet dernier, ne sauraient suffire à justifier légalement la mesure d’interdiction contestée. Le juge des référés en déduit que, dans ces conditions, le maire ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs de police, édicter des dispositions qui interdisent l’accès à la plage et la baignade alors qu’elles ne reposent ni sur des risques avérés de troubles à l’ordre public ni, par ailleurs, sur des motifs d’hygiène ou de décence.

Dans une ordonnance du 26 août 2016, le Juge des référés du Conseil d’Etat rappelle que les mesures de police que le maire d’une commune du littoral édicte en vue de réglementer l’accès à la plage et la pratique de la baignade doivent donc être adaptées, nécessaires et proportionnées au regard des seules nécessités de l’ordre public, telles qu’elles découlent des circonstances de temps et de lieu, et compte tenu des exigences qu’impliquent le bon accès au rivage, la sécurité de la baignade ainsi que l’hygiène et la décence sur la plage. Il n’appartient pas au maire de se fonder sur d’autres considérations et les restrictions qu’il apporte aux libertés doivent être justifiées par des risques avérés d’atteinte à l’ordre public.

Le 5 août 2016, le maire de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes) a pris un nouvel arrêté en vue de règlementer l’usage des plages concédées à la commune par l’État. Cet arrêté comporte un nouvel article 4.3 dont l’objet est d’interdire le port de tenues qui sont regardées comme manifestant de manière ostensible une appartenance religieuse lors de la baignade et, en conséquence, sur les plages qui donnent accès à celle-ci.

En l’espèce, concernant l’arrêté contesté, le juge des référés du Conseil d’État relève  qu’aucun élément produit devant lui ne permet de retenir que des risques de trouble à l’ordre public aient résulté, sur les plages de la commune de Villeneuve-Loubet, de la tenue adoptée en vue de la baignade par certaines personnes.

En l’absence de tels risques, l’émotion et les inquiétudes résultant des attentats terroristes, notamment de celui commis à Nice le 14 juillet dernier, ne sauraient suffire à justifier légalement la mesure d’interdiction contestée.

Le juge des référés en déduit que, dans ces conditions, le maire ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs de police, édicter des dispositions qui interdisent l’accès à la plage et la baignade alors qu’elles ne reposent ni sur des risques avérés de troubles à l’ordre public ni, par ailleurs, sur des motifs d’hygiène ou de décence.

Le juge des référés du Conseil d’État conclut donc que l’article 4.3 de l’arrêté contesté a porté une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont la liberté d’aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle.

La situation d’urgence étant par ailleurs caractérisée, il annule l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice et ordonne la suspension de cet article.

SOURCE : Conseil d’Etat, Ordonnance, 26 août 2016, Ligue des droits de l'homme et autres - association de défense des droits de l'homme collectif contre l'islamophobie en France, n° 402742,402777

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