Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Quels sont les types d'arguments que l’administration peut vous opposer en défense ?

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EN BREF : un moyen sera « irrecevable » s’il n'est assorti d’aucune justification, il « manquera en fait »  si vous invoquez à tort un élément non établi, il sera « inopérant » s’il est sans lien direct avec le litige, il ne « sera pas fondé » à condition que l’administration démontre sa légalité et enfin il sera d'« ordre public » et soulevé d’office par le juge, si la violation de la règle de droit est si grave (exemple : incompétence du juge administratif, tardiveté du recours, défaut d'intérêt pour agir, décision ne faisant pas grief) que le juge devra le soulever sans qu'ils l'aient été nécessairement par une des parties.

Un moyen soulevé dans votre requête pourra appeler de la part de l’administration défenderesse quatre types d'observations :

1 - le moyen sera « irrecevable » s’il n'est assorti d’aucune justification.

« Considérant que les opérations électorales qui se déroulent à l'occasion de la consultation des électeurs de la commune organisée par les articles L.125-1 et suivants du code des communes ne sont pas au nombre de celles qui peuvent être contestées devant le juge de l'élection en vertu des dispositions du code électoral ; que ces mêmes opérations ne constituent pas non plus par elles-mêmes un acte administratif qui serait susceptible d'être déféré au juge de l'excès de pouvoir ; qu'il s'ensuit que les conclusions de la requête de M. X... sont irrecevables en tant qu'elles sont dirigées contre les opérations électorales qui se sont déroulées le 9 mai 1993 à Saint-Palais ; »

Tribunal administratif de Poitiers, du 20 octobre 1993, publié au recueil Lebon

« Lorsque le préfet a, en application des dispositions de l'article L. 1612-5 du code général des collectivités territoriales, saisi la chambre régionale des comptes du budget d'une commune qu'il estimait voté en déséquilibre réel, un tiers est irrecevable à invoquer devant le juge administratif un moyen tiré de ce déséquilibre. Une requête fondée sur ce moyen reste irrecevable dans le cas où le préfet a entériné l'avis de la chambre régionale des comptes constatant le caractère suffisant des mesures contenues dans le budget primitif pour contribuer au rétablissement de l'équilibre budgétaire et où le requérant, qui a eu communication de cette décision, ne l'a pas contestée. »

Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, du 21 mai 1997, 482-96, mentionné aux tables du recueil Lebon

2 - le moyen « manquera en fait »  si vous invoquez à tort un élément non établi comme l’incompétence du signataire de l’acte, l’absence de consultation d'une commission, etc.

« Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée du 11 octobre 2006 a été transmise, le jour même, aux services du préfet de Paris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'elle n'aurait pas été transmise au préfet de Paris dans le délai de deux mois après qu'elle ait été prise, et méconnaîtrait ainsi les dispositions combinées des articles L. 213-2 du code de l'urbanisme et L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, manque en fait ; »

« Considérant, en quatrième lieu, que la décision de préemption attaquée a été notifiée à l'adresse du notaire mandataire de la société propriétaire du bien préempté conformément aux indications portées dans la déclaration d'intention d'aliéner, par huissier de justice, le jour même de l'intervention de cette décision et que cette notification était accompagnée de la copie d'une lettre dont elle précisait l'essentiel du contenu, à savoir l'identification de l'immeuble et le prix d'acquisition proposé par la Ville de Paris ; que la société requérante n'est donc pas fondée à soutenir que la notification de la décision de préemption contestée n'a pas été faite dans le délai réglementaire de deux mois à compter de la réception de la déclaration d'intention d'aliéner ; que, par ailleurs, le moyen tiré de ce que la notification n'était pas accompagnée de la lettre simple exigée par l'article 658 du nouveau code de procédure civile, manque en fait, eu égard aux mentions figurant sur l'acte d'huissier de justice ; »

Tribunal Administratif de Paris, 7ème Section - 2ème Chambre , 30/04/2009, 0618403

3 - le moyen sera « inopérant » s’il est sans lien direct avec le litige.

« Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les contrats mentionnés à l'article L.715-10 du code de la santé publique ne constituent pas des délégations de service public au sens de l'article 38 précité de la loi du 29 janvier 1993 mais de simples habilitations, données par l'Etat, à participer à l'exécution du service public hospitalier ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence de procédure de publicité préalablement à la passation du contrat entre l'Etat et la clinique de la Roseraie est inopérant ; »

« Considérant que si le CENTRE CARDIOLOGIQUE DU NORD soutient que le contrat passé entre l'Etat et la clinique de la Roseraie induirait des distorsions de concurrence entre les établissements d'un même secteur sanitaire, un tel moyen, à le supposer établi, est inopérant à l'appui de la contestation d'un contrat dont le principe, l'objet et les modalités ont été fixés par la loi ; »

Tribunal administratif de Paris, du 27 juin 2000, 9911581, publié au recueil Lebon

« Considérant, en cinquième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le service des domaines a donné le 4 octobre 2006 son avis sur le prix de l'immeuble préempté ; que le signataire de cet avis disposait d'une délégation de signature suivant arrêté du 1er septembre 2006 ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, cet arrêté a été publié le 15 septembre 2006 au recueil des actes administratifs de la préfecture de Paris comme l'atteste l'extrait dudit recueil produit par la Ville de Paris ; que la circonstance que cet arrêté de délégation de signature du 1er septembre 2006 ne mentionne que le nom et prénom du signataire et non sa qualité, est sans incidence sur la régularité dudit avis, lequel n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 qui ne s'applique pas dans les relations entre l'administration et ses agents ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le maire de Paris n'a pas justifié avoir consulté le service des domaines manque en fait ; que le moyen tiré de ce que l'avis du 4 octobre 2006 aurait été émis par une autorité ne disposant pas d'une délégation de signature régulière au regard de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, est inopérant ; »

Tribunal Administratif de Paris, 7ème Section - 2ème Chambre , 30/04/2009, 0618403

4 - le moyen ne « sera pas fondé » si l'administration démontre la légalité de sa décision au moyen d'une contre argumentation aussi développée que possible.

« Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et en particulier du compte-rendu de séance du 27 juin 2005 du conseil municipal d'Alfortville, dont les mentions ne sont pas utilement contestées par le requérant, que, en début de séance, celui-ci a fait obstacle à ce que le maire appelle les questions inscrites à l'ordre du jour, en interrompant systématiquement ce dernier, déclarant qu'il souhaitait faire une intervention non inscrite audit ordre du jour, soutenu par des individus présents dans la salle réservée au public, qui scandaient des propos en faveur de l'intéressé ; que, après avoir invité en vain M. P... à attendre l'épuisement de l'ordre du jour pour poser sa question, le maire a suspendu la séance et requis la force publique pour faire évacuer les individus susmentionnés avant de réunir à nouveau les élus qui ont décidé de poursuivre la séance à huis clos ; que, lors de la reprise des débats, M. P... a de nouveau interrompu systématiquement le maire, refusant d'obtempérer aux rappels à l'ordre de celui-ci ;

Considérant, en premier lieu, que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. P... ne conteste pas utilement les mentions du compte-rendu de la séance litigieuse du conseil municipal de la commune d'Alfortville ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué par lequel le maire a ordonné son expulsion de la salle avec le concours de la force publique serait entaché d'une erreur dans la matérialité des faits ; »

Tribunal Administratif de MELUN, 6ème chambre, 23/04/2009, 0505024

5 - le moyen sera d'« ordre public » et soulevé d’office par le juge, si la violation de la règle de droit est si grave (exemple : incompétence du juge administratif, tardiveté du recours, défaut d'intérêt pour agir, décision ne faisant pas grief) que le juge devra le soulever sans qu'ils l'aient été nécessairement par une des parties.

« Il résulte des dispositions de l'article R.351-4 du code de la construction et de l'habitation que l'aide personnalisée au logement est calculée au 1er juillet de chaque année pour une période d'un an et que le taux de l'aide ne peut être modifié en cours de période de paiement que dans les cas prévus aux articles R.351-10 à R.351-16 de ce même code. Le début de la vie maritale n'entre dans aucun des cas prévus aux articles R.351-10 à R.351-16 du code de la construction et de l'habitation. La section des aides publiques au logement commet donc une erreur de droit en mettant à la charge de l'allocataire un indu au titre des mois de février à juin pour le motif que celui-ci a débuté une vie maritale à compter du mois de février. Le moyen est d'ordre public en vertu du principe selon lequel on ne peut mettre à la charge d'une personne privée une somme qu'elle ne doit pas. »

Tribunal administratif de Lille, du 12 décembre 1995, 94-296, mentionné aux tables du recueil Lebon

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