Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Un courrier adressé au CNESER par le président de l'université demandant « qu'au minimum, soit maintenue la sanction » doit-il être regardé comme un appel incident ?

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NON : dans son arrêt en date du 17 décembre 2014, le Conseil d’Etat a précisé que le courrier adressé au CNESER le 21 avril 2011 par le président de l'université Paris 8, dans lequel ce dernier se borne à indiquer qu'il conclut à ce « qu'au minimum, soit maintenue la sanction infligée à Mlle A... », ne saurait être regardé comme valant appel incident.

Par une décision du 3 décembre 2010, la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université de Paris 8 a, sur la demande du président de l'université, infligé un avertissement à une étudiante inscrite en master 1 industries créatives à l'UFR culture et communications.

Saisi en appel par l'intéressée, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), statuant en matière disciplinaire, a, par une décision du 26 mars 2012 contre laquelle la requérante se pourvoit en cassation, annulé cette décision et prononcé une exclusion d'un an de cet établissement ainsi que l'annulation de la session d'examen en cause.

Dans son arrêt en date du 17 décembre 2014, le Conseil d’Etat a précisé que le courrier adressé au CNESER le 21 avril 2011 par le président de l'université Paris 8, dans lequel ce dernier se borne à indiquer qu'il conclut à ce « qu'au minimum, soit maintenue la sanction infligée à Mlle A... », ne saurait être regardé comme valant appel incident qui aurait donné au CNESER la possibilité d’aggraver la sanction après évocation.

SOURCE : Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 17/12/2014, 361488, Inédit au recueil Lebon

POUR MEMOIRE :

Le juge disciplinaire d'appel saisi du seul recours de la personne sanctionnée ne peut pas aggraver la sanction.

Il résulte des principes généraux du droit disciplinaire qu'une sanction infligée en première instance par une juridiction disciplinaire ne peut être aggravée par le juge disciplinaire d'appel saisi du seul recours de la personne sanctionnée, y compris lorsque le juge d'appel statue par voie d'évocation après avoir annulé le jugement de première instance. Le juge disciplinaire d'appel qui méconnaît cette règle ignore l'étendue de sa compétence. Cette règle appartient, dès lors, à l'ordre public qu'il appartient au juge de cassation de protéger, au besoin en relevant d'office sa méconnaissance.

Dans un arrêt en date du 17 juillet 2013, le Conseil d'Etat considère qu'il résulte des principes généraux du droit disciplinaire qu'une sanction infligée en première instance par une juridiction disciplinaire ne peut être aggravée par le juge d'appel saisi du seul recours de la personne frappée par la sanction. Cette règle s'applique y compris dans le cas où le juge d'appel, après avoir annulé la décision de première instance, se prononce par voie d'évocation. Relative à la compétence du juge d'appel, elle relève de l'ordre public et sa méconnaissance peut en conséquence être invoquée à tout moment de la procédure et qu'il appartient, le cas échéant, au juge de cassation de la relever d'office.

En l'espèce, il ressort des termes de la décision attaquée que, saisi en appel par M. A. de la décision de la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université d'Orléans l'excluant de tout établissement d'enseignement supérieur pour une durée de cinq ans en raison de faits de plagiat dans sa thèse de doctorat, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) a, par la décision attaquée, annulé pour irrégularité cette décision. Statuant par voie d'évocation, après avoir reconnu M. A. fautif des mêmes griefs, il a aggravé la sanction qui lui était infligée, en prononçant l'exclusion définitive de l'intéressé de tout établissement public d'enseignement supérieur.

En statuant ainsi, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) a méconnu l'étendue de sa compétence en aggravant la sanction infligée en première instance à M.A., alors qu'il n'était saisi que de l'appel de celui-ci et dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi, il y a lieu d'annuler la décision attaquée.

Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 17/07/2013, 362481, Publié au recueil Lebon

Voir aussi :

Conseil d'État, 4ème / 5ème SSR, 21/01/2015, 361529

« Il résulte des principes généraux du droit disciplinaire qu'une sanction infligée en première instance par une juridiction disciplinaire ne peut être aggravée par le juge d'appel saisi du seul recours de la personne frappée par la sanction. »

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