Maître André ICARD
Avocat au Barreau du Val de Marne

Antidopage : la lettre constatant un troisième manquement à l'obligation de localisation du sportif peut-elle faire l'objet d'un recours gracieux ou contentieux ?

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NON : dans son arrêt en date du 15 janvier 2015, le Conseil d'Etat considère que la lettre du 20 juin 2014 par laquelle le président de l'Agence française de lutte contre le dopage, constatant un troisième manquement aux obligations de localisation dans le délai prévu par l'article 13 de la délibération n° 54 des 12 juillet et 18 octobre 2007, a saisi, conformément aux dispositions de cet article, la fédération dont relève Mme B...aux fins d'engagement de poursuites disciplinaires ne constitue que le premier acte de la procédure pouvant conduire au prononcé d'une sanction à l'égard de l'intéressée. Présentant ainsi le caractère d'une mesure préparatoire, elle ne constitue pas par elle-même une décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Il en est de même en ce qui concerne la lettre rejetant la demande de révision à titre gracieux formée sur le fondement de la délibération du 5 novembre 2009.

1° Qui est donc Madame B... ? 

Mme B... a été désignée, par une délibération du 27 septembre 2012 du collège de l'Agence française de lutte contre le dopage, parmi les sportifs appartenant au groupe « cible » prévu par l'article L.232-15 du code du sport, astreints à une obligation de localisation à l'effet de permettre des contrôles inopinés relatifs à la lutte contre le dopage. 

Elle a été désignée à nouveau dans le groupe « cible » par des délibérations du 31 janvier 2013 et du 23 janvier 2014. 

2° Qu'a donc fait madame B... ? 

Elle a fait l'objet, le 29 mars 2013 puis le 25 février 2014, de deux avertissements pour avoir manqué aux obligations lui incombant à ce titre. 

3° Qu'a constaté l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) ? 

Sur la base des informations de localisation qu'elle avait fournies, l'Agence a décidé de la soumettre à un contrôle individualisé, le 10 juin 2014. 

4° Comment a-t-elle réagi ? 

Après que le préleveur mandaté à cette fin eut constaté l'absence de Mme B...lors de ce contrôle inopiné, le président de l'Agence a notifié à l'intéressée, en application de l'article 10 de la délibération n° 54 rectifiée des 12 juillet et 18 octobre 2007 du collège de l'Agence, un troisième avertissement pour manquement aux obligations de localisation, par lettre du 20 juin 2014. 

4° Comment a réagi Mme B ? 

a) Mme B a d'abord formé un recours gracieux qui a été rejeté par l'agence. 

La demande de révision à titre gracieux formée par Mme B..., sur le fondement de la délibération du 5 novembre 2009 de l'Agence portant modalités de gestion de manquements présumés aux obligations de localisation des sportifs faisant l'objet de contrôles individualisés, a été rejetée le 29 juillet 2014, conformément à l'avis négatif rendu le 25 juillet 2014 par le comité d'experts pour la localisation. 

b) Puis Mme B a demandé au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la lettre du 20 juin 2014 par laquelle le président de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) lui a notifié un troisième avertissement pour manquement aux obligations de localisation et le rejet, le 29 juillet 2014 par le comité d'experts pour la localisation, de sa demande de révision à titre gracieux. 

5° Qu'a répondu le Conseil d'Etat ? 

Dans son arrêt en date du 15 janvier 2015, le Conseil d'Etat considère que la lettre du 20 juin 2014 par laquelle le président de l'Agence française de lutte contre le dopage, constatant un troisième manquement aux obligations de localisation dans le délai prévu par l'article 13 de la délibération n° 54 des 12 juillet et 18 octobre 2007, a saisi, conformément aux dispositions de cet article, la fédération dont relève Mme B...aux fins d'engagement de poursuites disciplinaires ne constitue que le premier acte de la procédure pouvant conduire au prononcé d'une sanction à l'égard de l'intéressée. Présentant ainsi le caractère d'une mesure préparatoire, elle ne constitue pas par elle-même une décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Il en est de même en ce qui concerne la lettre rejetant la demande de révision à titre gracieux formée sur le fondement de la délibération du 5 novembre 2009. 

6° Quelle est la règlementation applicable en matière de localisation des sportifs en matière de lutte antidopage ? 

La délibération n° 54 des 12 juillet et 18 octobre 2007 de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) prévoit que chaque manquement aux obligations de localisation auxquelles sont soumis, en vertu de l'article L.232-15 du code du sport, les sportifs du groupe cible, donne lieu à un avertissement. Au troisième manquement aux obligations de localisation, l'agence transmet à la fédération compétente un constat d'infraction en vue de l'engagement d'une procédure disciplinaire

Aux termes du I de l'article L. 232-5 du code du sport : « L'Agence française de lutte contre le dopage, autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale, définit et met en oeuvre les actions de lutte contre le dopage (...) / A cet effet : / (...) 3° Pour les sportifs soumis à l'obligation de localisation mentionnée à l'article L. 232-15, elle diligente les contrôles dans les conditions prévues aux articles L. 232-12 à L. 232-16 : / (...) d) Hors des manifestations sportives mentionnées à l'article L. 230-3, et hors des périodes d'entraînement y préparant ; (...) » 

Aux termes de l'article L. 232-15 du même code : « Sont tenus de fournir des renseignements précis et actualisés sur leur localisation permettant la réalisation de contrôles mentionnés à l'article L. 232-5 les sportifs, constituant le groupe cible, désignés pour une année par l'Agence française de lutte contre le dopage (...) » 

Aux termes du II de l'article L. 232-17 de ce code : « Les manquements aux obligations de localisation prévues par l'article L. 232-15 sont (...) passibles des sanctions administratives prévues par les articles L. 232-21 à L. 232-23 » 

En vertu des dispositions de l'article L. 232-21, le sportif qui a manqué à ses obligations de localisation est passible de sanctions disciplinaires de la part de la fédération sportive auprès de laquelle il est licencié.

L'AFLD peut également infliger des sanctions disciplinaires, dans les conditions prévues à l'article L. 232-22, notamment en cas de carence de la fédération.  

SOURCE : Conseil d'État, 2ème / 7ème SSR, 27/02/2015, 384847

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